SYNOPSIS : Une réalisatrice part en province pour y présenter l'un de ses premiers films. Son itinéraire lui fait franchir plusieurs frontières, entre amour et amitié, espoir et déception, cinéma et quotidien routinier. Autant de territoires où seuls bises et baisers servent de passeport… Comédie légère et mélancolique

Claude Duty
a réalisé depuis 1974, à un rythme soutenu, plus d’une trentaine de courts métrages, dans tous les genres cinématographiques (fiction, animation, documentaire, expérimental). Son attachement et sa connaissance de ce format l’on conduit à travailler au sein des Programmes Courts de Canal+. Par ailleurs, il anime de nombreux débats et tables rondes en particulier au Festival du court métrage de Clermont Ferrand, au festival Off Courts de Trouville et au Festival de cinéma européen des Arcs.

En 2002, Claude Duty réalise et obtient un succès public avec son premier long métrage Filles perdues cheveux gras suivi de peu d’un deuxième Bienvenue au gîte. Son troisième long métrage Chez nous c’est trois ! est sorti en 2013. Il vient de terminer pour France télévision un nouveau court métrage La musique à l’eau.

FILMOGRAPHIE

2017 - LA MUSIQUE A L’EAU – CM 
2013 - CHEZ NOUS C’EST TROIS 
2011 - LA PEINTURE A L’HUILE – CM 
2010 - CIVILISATION – CM 
2003 - BIENVENUE AU GITE 
2001 - FILLES PERDUES CHEVEUX GRAS 
1995 - LA PUCELLE DES ZINCS – CM 
1988 - MOURIR EN MACEDOINE – CM
1986 - LES ENERVE DE JUMIEGES – CM 
1981 - OBSERVATION DE L’HEMATOZOAIRE DE LAVERAN – CM
1979 - MODE D’EMPLOI – CM 
1978 - LA RELIGIEUSE DE DIDEROT – CM


ENTRETIEN AVEC CLAUDE DUTY 

Chronologiquement, vous êtes le premier réalisateur à avoir choisi Noémie Lvovsky pour le rôle principal. Pourquoi un tel choix ?

Sincèrement, j’ai écrit le scénario sans penser à quelqu’un en particulier. Et puis, le nom de Noémie s’est imposé : elle est un personnage en soi, qui véhicule une drôlerie et une incroyable densité. Le fait qu’elle soit réalisatrice avant d’être comédienne était aussi une mise en abyme séduisante. On s’est rencontrés lors du Festival des Arcs en 2008 : je lui ai donné la première version du scénario ; elle était impressionnée par ma proposition et préparait Camille redouble, mais elle a accepté. J’ai parfois eu envie de baisser les bras, parce que le financement a été compliqué à boucler, mais mon producteur, à l’instar de Noémie, n’a jamais capitulé !
Je n’ai jamais eu peur de ce choix. J’avais bien donné à Marina Foïs son premier grand rôle au cinéma alors qu’elle sortait des « Robins des bois ». Ensuite, nous avons connu pas mal d’aléas, à commencer par la frilosité des financiers. D’abord parce que le scénario parle de cinéma, ensuite parce que, sur le papier, c’est une charmante petite musique qui peut sembler trop légère. Je savais pertinemment que l’incarnation des comédiens donnerait de l’ampleur à cette histoire. Et je ne me suis pas trompé.

Est-ce qu’à l’instar de son investissement sur Camille redouble, Noémie Lvovsky ne peut défendre un rôle que si elle le vit pleinement ?

Noémie ne sait pas faire semblant : elle est dans l’immersion totale si elle croit au film. Elle a insufflé une énergie incroyable à son personnage et au tournage, sans jamais être directive ni fondamentalement introspective. Son obsession est d’être dans la vérité du personnage. Depuis ses débuts au cinéma, Noémie s’est toujours lancée à corps perdu dans un rôle, ce qui se ressent puissamment à l’écran. Elle a amené une densité à Jeanne qui est un personnage en creux, plus observatrice qu’active, sans que l’on réécrive la moindre scène. Avec elle, les gens n’ont pas le droit d’être à la traîne !
Ce qui est amusant, c’est que Noémie a pu suggérer des coupes dans certains dialogues, elle qui est scénariste et amoureuse du verbe. Elle a parfois eu raison, notamment pour la scène du cocktail d’après projection où Jeanne passe de la lumière à l’ombre et déambule, seule et saoule, parmi les invités. Avec le recul, c’est vrai qu’un réalisateur éprouve de la solitude dans ce genre de situations : après avoir été sur la sellette, vous redevenez le parent pauvre de la soirée.

Malgré les déboires professionnels et sentimentaux de Jeanne, le film n’est jamais dépressif ou cynique sur le milieu du cinéma...

…Ou misérabiliste. Il n’y a pas toujours de confort et de pop-corn dans ce genre de tournée. Si le ton du film est empreint de mélancolie, c’est parce que Jeanne traverse aussi une passe difficile. Si elle ne s’obligeait pas à partir, elle sombrerait bien plus bas. C’est un film léger, agréable, d’autant plus que le public montré à l’écran, c’est nous ! Ses retours peuvent être aussi étonnants : les gens sont curieux, à l’écoute, critiques au sens vrai du terme, gourmands de débats. Je tenais aussi à ce que l’éventail des métiers liés au cinéma soit le plus large possible. À côté de Jeanne, il y a l’équipe de projection, la colonie où les jeunes apprennent à filmer, l’actrice incarnée par Judith Godrèche devenue star après avoir été lancée par le film de Jeanne, le producteur de documentaires, etc. J’aime ce qu’est le cinéma et ce qui gravite autour de lui. J’ai toujours eu du respect pour tous ces gens impliqués et passionnés : être dur ou cynique envers eux ne me ressemblerait pas.

Jeanne revient également dans son village d’enfance. En quoi la confrontation avec ses racines vous intéressait-elle ?

Cela me touche pour plusieurs raisons. Je suis né à Tunis ; ensuite, je suis parti à 10 ans pour habiter à Rouen ; enfin, j’ai dû monter à Paris pour travailler. Je me sens parfois tiraillé entre ces différents lieux, même si je vis toujours à Rouen et que je m’épanouis en province. Dans le film, Jeanne est abruptement confrontée à son passé mais c’est dans son village natal qu’elle va reprendre pied. Elle retrouve les lieux de son enfance, l’amour de sa vie, comme la promesse d’un nouveau départ. En définitive, tous les personnages du film se cherchent : Souleyman est un Africain qui prépare sa thèse sur des coutumes françaises ; le personnage de Marie Kremer est tiraillé par ses origines belges ; la fille de Gabriel veut aller voir ailleurs si l’herbe est plus verte, etc. J’aime aussi le thème du retour à la nature ; je l’avais développé dans Bienvenue au gîte et dans l’un de mes court-métrages récents, La peinture à l’huile. Je suis un passionné de randonnées et j’adore évoquer les gens qui « font la route »... Il y a un côté contemplatif dans Chez nous, c'est trois !, parce que je prends le temps d’observer Jeanne, rêveuse et perdue dans ses pensées. Nous avions des impératifs liés aux quatre semaines de tournage, mais je tenais à ces pauses, à ces moments d’attente qui précèdent la projection nocturne d’un film.

Face aux multiples questions du public, Jeanne répond souvent : « Je ne sais pas ». Un réalisateur est-il en droit de ne pas analyser son film ?

Absolument ! Je fais des films qui répondent à une envie et non à des intentions claires. Analyser le « pourquoi » mène à l’introspection, ce dont on n’a pas forcément envie. Lors de la sortie de Filles perdues, cheveux gras, j’avais été choqué par la réaction de certains adolescents qui me demandaient si j’avais voulu dénoncer quelque chose, quel était mon message... Je n’en ai jamais eu : je montre mais je ne démontre pas. L’inverse serait plus rassurant pour les spectateurs ; ils attendent souvent qu’un film serve à quelque chose. Un film est forcément une projection de ce que l’on est. Aujourd’hui, on me dit que Chez nous, c'est trois ! me ressemble énormément. À la fois grave et léger, pince-sans-rire. Cela m’intrigue parce que j’aimerais bien savoir qui je suis !

On sent que vous avez de l’empathie pour tous vos personnages, au point de leur donner une chance de se « racheter », d’évoluer...

Je préfère donner au spectateur un goût d’optimisme et d’humanité. Seul le personnage du fonctionnaire, incarné par Olivier Saladin, est abominable même si, avec mon co-scénariste Christian Clères, on a voulu y mettre de l’humour. Filles perdues, cheveux gras commence par une tentative de suicide, mais elle est tellement ridicule que la gravité est désamorcée ! Il n’y a pas non plus de gros gags ni de chutes délirantes dans mes films. Ce qui ne m’empêche pas de fantasmer à l’idée de réaliser mon Y a-t-il un pilote dans l’avion ? ou de m’aventurer dans le genre fantastique, heroic fantasy.
Ce regard que j’ai sur mes personnages est aussi celui que m’ont renvoyé les acteurs du film. Noémie, comme je l’ai évoqué, et tous les autres...

(source : Dossier de presse Rezo Films)


CRITIQUE : "Un film qui n'a pas besoin de montrer ses muscles pour prouver qu'il a du coeur." Marianne

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